Que ce soit les professions libérales ou les commerçants bénéficiant d’une assurance « perte d’exploitation », tous se sont vu opposé par leur compagnie d’assurance l’exclusion de leur garantie dans le cadre de la pandémie.
Soit parce que le risque ne rentrait pas dans les conditions contractuelles, surtout pour les professions libérales qui n’ont pas été frappées par un arrêté préfectoral de fermeture mais uniquement par une décision gouvernementale de confinement, soit parce que cette situation était inassurable et imprévisible.
Un restaurateur a pourtant tenté un référé pour obtenir gain de cause contre son assureur et le Tribunal de Commerce de Paris, dont les juges sont des professionnels et qui ont vu d’un tout autre œil les conséquences économiques dramatiques conduisant à des situations inacceptables se sont engagés sur une voie d’ouverture à la prise en charge des pertes d’exploitation liées à cette situation à la charge des assureurs.
Bien entendu il s’agit d’une condamnation provisionnelle et d’une décision en référé qui pourra être remise en cause soit par l’appel soit par une action au fond.
Le Tribunal de Commerce de Paris, a condamné la société AXA France au versement d’une provision de 45 000 € au commerçant, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation suite à la fermeture administrative de son établissement, et à ordonné une expertise pour fixer le montant définitif du préjudice, les deux conditions du référé l’urgence et l’absence de contestation sérieuse étant réunies.
AXA France IARD explique le caractère inassurable du risque pandémique tant au plan économique que juridique, le Tribunal considère qu’il n’a pas à se prononcer sur l’application d’un contrat d’assurance précis comportant conditions générales, conditions particulières et intercalaire SATEC le tout constituant la loi des parties et ceci, sans avoir à trancher de contestations sérieuses.
Pour le tribunal, AXA ne s’appuie sur aucune disposition légale d’ordre public mentionnant le caractère inassurable d’une conséquence d’une pandémie, il incombait donc à AXA d’exclure conventionnellement ce risque. Or ce risque pandémique n’est pas exclu du contrat signé entre les parties.
AXA France IARD prétend que l’application de la clause fermeture administrative doit avoir pour fait générateur la réalisation préalable d’un événement garanti au titre de la perte d’exploitation
Cette affirmation n’est étayée par aucune référence contractuelle. Les conditions particulières et l’intercalaire SATEC mentionnent la fermeture administrative comme une extension de la perte d’exploitation au même titre par exemple que « meurtres ou suicides dans l’établissement ». Aucun préalable n’est exigé contractuellement, ainsi cette allégation a été écartée.
AXA France IARD avance que la fermeture administrative qui était visée dans le contrat était celle qui est prise par le préfet du lieu où est situé l’établissement et non par le ministre de la santé. Que ce soit le préfet ou le ministre, en droit français, il s’agit dans les deux cas d’une décision administrative et aucune exclusion contractuelle ne vise le ministre. Cette contestation a été également écartée comme non sérieuse.
AXA France mentionne en outre que l’arrêté du 14 mars 2020 n’impose pas la fermeture de l’établissement mais seulement de ne plus accueillir du public et que celui-ci est autorisé à maintenir son activité à emporter et de livraison et d’en conclure que l’établissement n’a été fermé que par la décision du chef d’entreprise qui n’a pas voulu se lancer dans la vente à emporter.
Or, pour le tribunal a supposer que cette activité fut possible, le fait de n’y avoir pas recouru ne supprime pas l’interdiction de ne plus recevoir du public ce qui est fondamental pour un restaurant traditionnel. La marge que procurerait cette activité de vente à emporter pour autant qu’elle en procure devrait être prise en compte dans la détermination du montant garanti. L’interdiction de recevoir du public est bien une fermeture administrative totale ou partielle du restaurant. Cette contestation sera donc également écartée comme non sérieuse.
Il faudra suivre les prochaines décisions à intervenir et conseiller les assurés à déjà tenter une négociation avec leur assureur et à défaut que cette négociation aboutisse, assigner.